VITRAGE CHAUFFANT
PERFORMANCES ENERGETIQUES & CONFORT
Article rédigé par SYSELIA (www.syselia.com)
Version du 10 octobre 2022
Beaucoup d’approximations et interprétations démontrent une méconnaissance des phénomènes de transfert thermiques et optiques attachés aux vitrages chauffants.
Face à une toute relative complexité physique, de nombreux acteurs (verriers, soi-disante ingénierie, …) ont fait appel des à des BE, laboratoires … afin de conforter leurs argumentaires commerciaux.
Malgré des résultats en retour souvent contraires aux arguments affichés, ces acteurs continuent à présenter de manière trompeuse leurs produits / solutions à base de vitrages chauffants et leurs politique comme étant respectueuse de l’environnement.
Ces argumentaires sont souvent repris par ignorance par les menuisiers et fenêtriers dans leurs publications commerciales mais également par la presse spécialisée peu enclin à démêler le vrai du faux.
A l’heure des grands défis environnementaux, il y lieu de se mobiliser contre ce greenwashing (ou écoblanchiment).
L’objectif de cet article est d’essayer d’y voir plus clair, de conforter ou de nuancer les arguments souvent tapageurs et parfois faux concernant les vitrages chauffants.
Les propriétés thermiques et optiques du vitrage chauffant reprises dans cet article émanent toutes de publications scientifiques, d’études mais aussi d’essais et simulations effectuées par Syselia et des laboratoires de notoriété internationale.
Il y a lieu de remercier Jean-Meyer pour la publication dans le N° 149 d’avril-mai 2022 de « métalfash » d’un article relatif au vitrage chauffant reprenant en partie le texte qui suit.
Une technologie ancienne
Un vitrage chauffant est généralement un vitrage double, semblable à un double vitrage conventionnel.
Une couche transparente (électriquement) conductrice recouvre la paroi interne d’un des verres. Lorsque cette couche est parcourue par un courant, elle émet de la chaleur.
Il ne s’agit pas d’une technologie innovante, elle est utilisée depuis des décennies dans l’aviation et la marine à des fins de dégivrage.
Avec un brevet déposé en 1987 Pierre GLORIEUX est à l’origine de son développement en Europe dans le domaine du bâtiment.
Pierre Glorieux présentant en 1987 son vitrage chauffant IQ GLASS (© Syselia)
Rayonnement et convection
Les systèmes de chauffage propagent principalement leur énergie dans une pièce par convection et par rayonnement :
- la convection chauffe l’air de la pièce,
- Le rayonnement chauffe les corps, les parois, les objets et procure une agréable et rapide sensation de confort.
Les échanges par conduction (contact) peuvent être supposés négligeables.
La quantité de chaleur totale QT transférée par un système de chauffage peut donc être considérée par la relation suivante :
QT = QC (échanges de chaleur par convection) + QR (échanges de chaleur par rayonnement).
QC et QR se complètent à 100 %.
Pour les émetteurs courants le tableau ci-après précise la proportion rayonnement / convection.
Mode de restitution de la chaleur pour un vitrage chauffant (© Syselia)
Les études et essais réalisés sur les vitrages chauffants par des laboratoires renommés, de référence en matière de métrologie, montrent que la part de flux thermique (échanges de chaleur) produite par un vitrage chauffant est de l’ordre de 60 % pour la partie radiative contre 40 % pour la partie convective.
Ce sont des valeurs proches de celles d’un plancher chauffant.
Elles viennent corroborés les résultats obtenus par Syselia par simulation.
Dans le cadre de son activité R&D sur les vitrages chauffants, Syselia a développé un module permettant de reproduire sous TRNSYS (logiciel de Simulation Energétique Dynamique de bâtiments et de systèmes) le comportement thermique de ce vitrage.
Mode de restitution de la chaleur pour un vitrage chauffant (© Syselia)
Malgré la connaissance de cette répartition certains acteurs majeurs dans le domaine du vitrage chauffant (constructeur, intégrateur, …) continuent à tort de présenter ce vitrage comme un générateur de chauffage transmettant uniquement son énergie par rayonnement. Cette présentation est fausse et donc trompeuse.
Métrologie et essais de vitrages chauffants(© Syselia)
Caractérisation physique d’un vitrage :
Un vitrage est caractérisé par trois paramètres :
- le coefficient de transfert thermique Ug (plus Ug est faible, plus le vitrage est isolant),
- le coefficient transmission énergétique g ou Facteur Solaire FS (Plus le FS est élevé, plus le vitrage laissera entrer l’énergie solaire),
- le coefficient de transmission lumineuse TL (Plus TL est élevé, plus la quantité de lumière qui traverse le vitrage est élevée).
La complexité dans la définition d’un vitrage est de jouer sur les différents tableaux.
On lui demande d’isoler du froid extérieur (Ug), de ne pas laisser entrer trop de chaleur en été, mais de profiter du rayonnement solaire l’hiver (FS) et de laisser passer la lumière naturelle (TL).
Le comportement thermique du vitrage n’est pas impacté par le coefficient de transmission lumineuse TL.
Transferts thermiques
Tous les éléments de l’enveloppe du bâtiment, dont les vitrages, sont déperditifs.
Le coefficient de transmission thermique Ug (g comme glass) caractérise le pouvoir d’isolation d’un vitrage. Plus le coefficient Ug est faible, plus le vitrage est isolant.
Valeur de l’Ug en fonction du type de vitrage (© Saint-Gobain)
Avec un Ug de 1,1 W/m².K (Watt par m² et par degré), un double vitrage ITR (Isolation Thermique Renforcée) d’1 m² perd 1,1 W pour une différence d’1 °C entre les parois extérieures et intérieures.
DTVitrage = Ug x Surface vitrage x Ecart température (intérieur – extérieur)
Les Déperditions Thermiques (DT) en Watt (ou en kW) d’un vitrage représentent le flux de chaleur qui se propage de la face intérieure chaude vers sa face extérieure froide, par conduction, rayonnement et convection. Cette grandeur évolue en fonction de valeur est proportionnelle à la différence de température entre les deux milieux.
En raison de leur composition similaire, l’Ug d’un vitrage chauffant lorsqu’il ne fonctionnement pas est quasi identique à celle d’un double vitrage ITR.
Comparaison performances thermiques vitrage chauffant vs radiateur électrique
Comme on peut intuitivement le pressentir, le fait d’apposer le chauffage d’une pièce sur ses surfaces les plus froides et les plus déperditives est une mauvaise idée.
Les essais et simulations avec une température extérieure de 0°C et une température de consigne de 20°C ont permis de montrer que les vitrages chauffants sont plus énergivores que les radiateurs électriques è + 23 %.
Comparaison performances thermiques vitrage chauffant vs radiateur électrique (© Syselia)
Aussi, pour le vitrage chauffant, l’augmentation de la température de surface du verre intérieur est un inconvénient majeur. En effet, plus on chauffe le vitrage, plus on « chauffe l’extérieur » et plus les déperditions sont importantes.
Le vitrage chauffant utilisé comme moyen de chauffage principal ne peut pas être vertueux.
Le présenter comme un chauffage pouvant apporter jusqu’à 40 % d’économie d’énergie est absolument faux.
Pour limiter les déperditions, avec une valeur Ug proche de celle d’un mûr bien isolé, le triple vitrage et le vitrage sous vide (type Fineo d’AGC Glass) associés à un chauffage électrique traditionnel sont des alternatives bien plus crédibles.
Le vitrage chauffant comme tous les chauffages électriques fonctionnent sur le principe de l’effet joule. L’appareil comporte une résistance électrique : lorsque le courant la traverse, elle chauffe et produit de la chaleur.
En pratique les émetteurs à effet joule affichent tous un rendement de conversion de 100 %.
En pratique la consommation d’un chauffage électrique varie en fonction de nombreux paramètres : température, proportionnalité convection / radiation, type de logement (isolation), localisation et attentes de ses occupant en termes de confort.
Le bilan énergétique d’un vitrage chauffant peut être défini par la relation suivante :
Ec (Energie électrique consommée) = Eu (Energie thermique Utile dégagée par la surface intérieure du vitrage) + Ep (Energie thermique perdue dégagée par la surface extérieure du vitrage) + El (Energie thermique dissipée en partie latérale du vitrage)
Schéma de bilan énergétique d’un vitrage chauffant (© Syselia)
Les essais et simulations avec une température extérieure de 0°C et une température de consigne de 20°C ont permis de démontrer que seulement 60% de l’énergie électrique consommée par le vitrage chauffant sert au chauffage du local.
Bilan énergétique d’un vitrage chauffant (© Syselia)
Le facteur solaire correspond au pourcentage de fraction d’énergie solaire qui entre dans le bâtiment en traversant le vitrage.
Il est impacté par la position de la couche basse émissivité (Low-E) dont la fonction principale est de diminuer la valeur Ug.
Si on cherche à bénéficier au maximum des apports solaires gratuits et donc à diminuer la facture de chauffage l’hiver, la couche Low-E doit être positionnée sur le verre intérieur du double vitrage (en face 3).
Si on cherche à limiter les apports solaires et donc à réduire la climatisation l’été, la couche Low-E sera positionnée sur le verre extérieur du double vitrage (en face 2).
Selon que l’on souhaite obtenir un double vitrage présentant un facteur solaire faible, ou au contraire élevé, Saint-Gobain propose 2 vitrages ITR Planitherm dans son catalogue.
Facteur solaire vitrage PLANITHERM (© Saint-Gobain)
Dans le cas du vitrage chauffant la couche Low-E est toujours placée sur le verre extérieur du double vitrage (en face 2). Ce positionnement impacte négativement les performances thermiques du vitrage chauffant.
Souvent ignorée, cette spécificité ne doit pas être oubliée lors des études.
A savoir aussi que la position de la couche Low-E dans un double vitrage n’affecte en rien le facteur Ug de celui-ci.
Le confort
Les mécanismes d’autorégulation du corps humain laissent apparaître une plage de température où le confort thermique est atteint. On définit une température de confort ressentie, dite encore température opérative.
Température opérative = (température air + température paroi) / 2
De cette formulation physique les conditions nécessaires au confort thermique sont définies par différentes normes / règles. A retenir notamment celles-ci :
- Installer des émetteurs qui restituent la chaleur à la fois par rayonnement et par convection,
- Limiter l’écart de température entre les parois et l’air ambiant à 3 °C.
Les situations d’inconfort thermique peuvent être liés aux parois froides (vitrages, murs mal isolés, …) mais aussi aux parois chaudes (vitrages ensoleillés, émetteur de chaleur rayonnant).
Le confort thermique étant variable selon les individus, il est primordial que les émetteurs de chauffage puissent répondre et s’adapter aux besoins de confort de l’occupant.
A quelle température se sent-on bien chez soi ? (© ADEME)
L’évaluation du confort thermique dans un lieu donné ne dépend donc pas seulement de la température de l’air ambiant, mais également de la proximité éventuelle de surfaces froides.
Lorsqu’il s’approche de telles surfaces, le corps humain, dont la température cutanée est de l’ordre de 28°C, se comporte comme un «radiateur».
L’énergie ainsi dissipée se traduit par une désagréable sensation de froid.
L’utilisation de vitrage ITR (Isolation Thermique Renforcée) bien isolé permet non seulement de limiter les pertes énergétiques, mais aussi de supprimer la sensation d’inconfort engendrée par les parois froides.
Lors des mois d’hiver ou la température extérieure moyenne en France est de 5°C, la bonne isolation du vitrage ITR lui donne une température de surface proche de la température de la pièce.
Dans ces conditions de température l’utilisation de vitrage chauffant ne se justifie pas.
Évolution en hiver de la température de la face intérieure du vitrage en fonction de la valeur Ug (© AGC Glass)
Comparaison des performances confort vitrage chauffant vs radiateur électrique
Les essais et simulations avec une température extérieure de 0°C et une température de consigne de 20°C ont permis de montrer que :
- le temps nécessaire à la montée à la température de consigne est significativement supérieur dans le cas des vitrages chauffants en comparaison avec celui des radiateurs électriques pour une puissance installée similaire,
- en régime permanent, pour une même température de consigne, la température ressentie/température de confort est à peine plus élevée avec les vitrages chauffants qu’avec des radiateurs (écart négligeable),
- l’abaissement de la température de consigne du vitrage chauffant fait proportionnellement baisser la température de confort,
- la température du verre intérieur peut dans le cas du vitrage chauffant être source d’inconfort du fait d’une valeur nettement supérieure à la température ambiante de la pièce.
Comparaison performances confort vitrage chauffant vs radiateur électrique (© Syselia)
Présenter le vitrage chauffant comme un chauffage pouvant permettre de réduire la température de consigne de 3°C est par conséquent faux.
A retenir aussi, qu’au même titre que le soleil en été, le vitrage chauffant peut être une source d’inconfort en hiver.